Mais où est passé le personnel dentaire ?

C’est une question que nous entendons souvent. Nous pensons que nous devrions plutôt poser les questions suivantes : Quand reviendra-t-il? Que faire pour l’attirer?

Depuis 2008, la population active est en décroissance au Canada. Ce phénomène est arrivé bien avant dans d’autres pays industrialisés. Ce déclin s’est même accéléré à partir de 2015. Bien entendu, le Québec n’a pas été épargné par cette tendance. Tous les secteurs économiques sont entrés en concurrence pour attirer les travailleurs. Chaque action efficace pour attirer les travailleurs dans un secteur résulte en une perte de travailleurs pour les autres secteurs d’activité. Par nos efforts à rechercher du personnel, nous en sommes venus à déshabiller Pierre pour habiller Paul.

Quand tous ces travailleurs reviendront-ils? D’après plusieurs spécialistes de la démographie, il faudra attendre 2030 pour voir un retour vers la normale. Il faut aussi réaliser qu’en 2031 le problème ne sera pas réglé comme par magie. Il faudra un certain temps pour satisfaire nos besoins en personnel. Si on y arrive un jour.

L’enjeu n’est donc pas de trouver une solution pour qu’il y ait plus de travailleurs, mais plutôt de s’assurer que ce soit dans notre secteur d’activité que les gens désirent travailler.

Selon nous, voici ce sur quoi nous devons concentrer nos efforts.

• Rendre les conditions salariales plus intéressantes et le faire connaître à l’échelle de la province. Le rapport de force entre employeurs et employés ayant été inversé, les salaires ont déjà commencé à augmenter dans notre secteur d’activité. Il ne faut pas le voir comme une calamité, mais bien comme une stratégie pour attirer des travailleurs à choisir le domaine dentaire pour poursuivre leur carrière.

• Attirer les groupes de personnes sous-utilisés. Des personnes en situation de handicap pourraient, avec un minimum d’adaptation, pourvoir certains postes dans les cliniques dentaires, par exemple, au secrétariat pour les personnes à mobilité réduite. Les personnes ne pouvant travailler qu’à temps partiel étant déjà bien représentées au sein de nos cliniques, des réaménagements organisationnels pourraient permettre d’en attirer encore plus.

• Pousser au maximum le concept de conciliation travail-famille. Notre secteur d’activité attirant principalement les femmes, nous devons déjà composer avec les considérations familiales de nos employées. Ce n’est cependant pas facilement applicable dans d’autres secteurs de l’économie. En poussant plus loin nos accommodements et en le publicisant, plus de femmes choisiront le domaine dentaire pour travailler et avoir des enfants.

• Offrir des possibilités de développement professionnel à tous les employés. Envisager aussi de donner de la formation en clinique pour certaines personnes ayant un intérêt pour notre domaine d’activité sans nécessairement avoir de l’expérience. Cela se fait avec des plans de formation bien structurés.
  

Notre société ne générant plus assez de travailleurs, c’est notre secteur d’activité tout entier qui doit devenir plus intéressant que les autres.

Yves Carrière, professeur agrégé et directeur du Département de démographie de l’Université de Montréal